Comme chaque année, la parole du poète et dramaturge Pierre Gope trouve une place dans notre programmation. Car au fil de ses pièces, loin de la parole de ceux qui croient tout savoir, ce faiseur de théâtre nous dépeint une Calédonie pleine de ses doutes, de ses errances et de ses espoirs. Un théâtre qui n’est jamais lisse, qui toujours nous questionne et nous bouscule parfois.
Dans cette nouvelle pièce, Pierre Gope nous invite dans le futur. Nous sommes en 2118. Les compétences ont été transférées au pays. La France laisse derrière elle un pays brisé, endommagé au plus profond de son tissu économique, social et culturel. Il est du devoir des hommes et de leur nouveau gouvernement local de reconstruire leur patrimoine.
Sur la scène à demi-éclairée, un épouvantail se dresse au milieu du salon de monsieur Kris, que tout le monde dans la région appelle «le petit seigneur»...
Après L’histoire et l’endroit, présentée l’an dernier, qui évoquait l’épisode de l’embuscade de Wan Yaat et les tensions issues de la colonisation, Pierre Gope se tourne, avec Un souffle de luxure, sur le futur. Nous sommes en 2118. « Kanaky libre, mais pour quelle espèce de Kanak ? », crie l’un des personnages. Résumant ainsi une partie des interrogations et des « peurs » que Pierre Gope a voulu exprimer : « S’il n’y a plus la France, s’il n’y a plus de montagnes, s’il n’y a plus de richesses, les tensions seront présentes. » Estimant « dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas », le dramaturge exprime ses convictions personnelles.
Tragi-comédie
La tension, la violence qu’il a voulu exprimer montent dans certaines scènes, mais Pierre Gope a choisi d’alterner avec le rire, privilégiant la forme classique de la tragi-comédie. « On peut parler autrement de la violence, de la politique, de la misère : par la dérision plutôt que par la critique, la rigidité des individus. Cela permet de garder de la souplesse à l’intérieur de choses graves et de garder une passerelle avec le public. »
Et après s’être ainsi penché sur le passé, puis le futur, Pierre Gope a commencé à travailler sur un autre « après », la mort. « La mort se lève de son tombeau pour dire “Arrête de pleurer, tu m’as trahie”. Parce qu’ici, on est des pleureuses professionnelles », résume l’auteur.
Au fil des pièces, Pierre Gope explore les sujets qui fâchent, critique les travers de la société et, en se concentrant sur son pays, s’intéresse surtout à la nature humaine. C’est d’elle, surtout, qu’il parle dans Un souffle de luxure. Comme les grands auteurs avant lui.